La 69ème édition du Concours Eurovision de la chanson n’a pas permis à la représentante de la France de remporter le trophée. Mais cela a été l’occasion pour Stéphane de réaliser combien le dispositif de ce concours avait évolué. Il n’en est pas moins resté froid. 

Par Stéphane Lecomte

Imaginé en 1956 par le directeur général de la Télévision publique suisse, Marcel Bezençon, le Concours Eurovision de la chanson ne réunissait à l’origine que sept pays, dont la France. Ce sont des raisons géopolitiques qui ont motivé sa création, le souhait étant de solidifier l’Europe communautaire naissante. Et c’est l’Union Européenne de Radio-Télévision (UER), créée en 1950, qui s’est retrouvée en charge de sa bonne marche. Le thème musical d’ouverture puise dans l’œuvre de Marc-Antoine Charpentier et son fameux Te Deum. Lors de la première édition de ce concours, c’est une Suissesse qui a remporté les suffrages, à l’issue d’un vote secret avec à la clef la suppression des bulletins aussitôt le concours terminé ! Soixante-neuf plus tard, l’Eurovision existe toujours mais sa présentation a changé.  

Outre l’ouverture du concours à la plupart des pays européens, mais aussi à Israël (depuis 1973) et à l’Australie (depuis 2015, tous deux affiliés à l’UER), des changements importants ont contribué à sa perduration. Il y a eu, en1998, la disparition de l’orchestre accompagnant les interprètes, puis l’élaboration de chorégraphies qui ont pris peu à peu les allures d’un show américain sorti d’une scène de Las Vegas, et un système de vote qui a intégré celui des téléspectateurs depuis leur confortable canapé ! La dimension géopolitique est restée présente : elle est notamment symbolisée par l’exclusion de la Russie depuis l’invasion de l’Ukraine, et par des votes parfois douteux et partiaux de la part de certains jurys.    

Si l’anglais prédomine depuis des décennies dans ce concours de la chanson, des langues insolites s’y invitent :  le oudmourte (langue parlée en Oural), le sranan (créole du Suriname), le voralbergeois (dialecte allemand), et même une langue imaginaire (chantée par le groupe belge Urban Trad en 2003) ont droit d’être chantées. Les premiers ayant triomphé dans leur langue non maternelle sont les célèbres suédois ABBA, en 1974 avec leur non moins célèbre titre Waterloo ! Quant à la dernière fois où la langue de Molière a eu droit à la première place, cela remonte déjà à 1988. Et c’est la toute jeune et prometteuse Céline Dion qui s’imposa avec Ne partez pas sans moi… sous les couleurs suisses !

« Trahie » par un vote public bien médiocre, en cette année 2025 (une cinquantaine de points récoltés seulement contre 436 pour JJ, l’Autrichien gagnant), la représentante tricolore, Louane, n’a pas ramené le trophée à la maison. Marie Myriam, vainqueur en 1977 avec sa jolie ritournelle L’oiseau et l’enfant risque de hanter jusqu’à leur trépas ceux qui l’ont vue s’imposer sans que plaisir ne leur soit donné d’exprimer un nouveau cocorico.