La Cité Internationale de la Langue Française a été inaugurée le 30 octobre 2023 par le président Macron à Villers-Cotterêts (Aisne). Martine y est allée récemment et y a trouvé matière à partager cette belle découverte.

Par Martine Lelait.

A l’occasion d’un récent week-end aux confins de l’Aisne et de l’Oise, j’ai découvert avec beaucoup de plaisir la Cité Internationale de la Langue Française à Villers-Cotterêts, ville qui se trouve être par ailleurs, je l’ai appris ce jour-là, le lieu de naissance d’Alexandre Dumas.

Le cadre est grandiose, c’est celui du château voulu à l’origine par François 1er qui appréciait la giboyeuse forêt domaniale de Retz, au cœur du duché de Valois, pour venir y chasser. Depuis, le château a connu différentes vies : une vie de fastes et de fêtes royales (Molière y jouera pour Louis XIV), une vie de remaniements, agrandi au XVIIIe siècle, transformé en caserne au moment de la Révolution française, reconverti en dépôt de mendicité qui accueillera jusqu’à deux mille indigents au début du XIXe siècle, en hôpital militaire pendant la Première Guerre mondiale avant de devenir une maison de retraite jusqu’en 2014 (c’est encore l’inscription qui figure au fronton, côté rue).

Quand on entre dans la cour, on est de prime abord frappé par l’ampleur des bâtiments et la luminosité de la pierre blonde. Passé le portail d’entrée, c’est une autre grande cour étonnante qui accueille les visiteurs. A l’époque de François 1er, qui n’était pas que chasseur mais aussi un grand sportif, cette cour était à ciel ouvert : c’était l’espace dédié au jeu de paume.  

Les concepteurs de la Cité de la Langue Française ont magnifiquement œuvré en recouvrant cet espace d’une immense verrière à 15 m de hauteur, une véritable prouesse architecturale. A ce plafond de verre, brillent une centaine de mots, choisis notamment via une consultation des habitants, ciel de mots qui cueille la curiosité de tous les visiteurs.

Certains de ces mots nous sont plus ou moins familiers : bouquin, rendez-vous, traduire, créole, carabistouille, palindrome, courriel, grammaire, calligramme, argot et le fameux divulgacher que l’on entend de plus en plus. D’autres en revanche sont moins usités ou sont issus de langues régionales ou de pays francophones : wassingue, drache, camembérer, clavardage, ziboulateur, tataouiner et le très beau (à mes yeux) royaumer ! La solution à la fin de cet article si vous voulez la traduction !

Dans la chapelle royale où se poursuit la visite, figure une plaque commémorative qui indique : « Ici François 1er rendit le 10 avril 1539 l’ordonnance prescrivant que les jugements, arrêts ou actes judiciaires seraient dorénavant transcrits en langue française ».  Or, notre guide conférencière nous a précisé que cette plaque était fausse ! D’abord, même si François était « Roy de France par la Grâce de Dieu », cet acte royal n’a certainement pas été pris dans cet édifice religieux mais dans une autre pièce du château, un bureau plus vraisemblablement, et surtout ce n’était pas le 10 avril mais le 25 août ! Ce qui reste entièrement vrai, c’est que, par cette ordonnance dite désormais de Villers-Cotterêts, le roi a imposé le français comme langue officielle pour tous les actes de l’Administration et de la Justice, en remplacement du latin, langue de l’Église. C’est le plus vieux texte de loi connu en France qui soit toujours en vigueur. L’ordonnance figure en bonne place dans une vitrine du musée.

On pourrait rester des journées entières au premier étage du logis royal où se déroule sur quelque 1200 m2 d’expositions un parcours très ludique ; on y apprend que environ 320 millions de personnes dans le monde parlent le français. On y voit comment nombre de mots français sont en réalité des emprunts à d’autres langues, comment le français se réinvente en permanence. Les interactions ludiques avec le public sont nombreuses. Je ne citerai qu’une espèce de bibliothèque virtuelle personnalisée ; dans un petit espace fermé, devant un écran qui couvre trois des murs, après avoir répondu à quelques questions sous forme de QCM (exemples : ce qu’il recherche dans la lecture, sa sensation à la fin d’un livre …) le visiteur se voit proposer LE livre qui lui ressemble. Bluffant !

Malheureusement je n’ai pas eu le temps de tout voir, de tout essayer mais vous l’aurez compris, c’est une visite que je vous recommande chaleureusement.

L’explication des mots étonnants :
wassingue = serpillière
drache = pluie
camembérer = puer des pieds 
clavardage = bavarder via un clavier
ziboulateur = décapsuleur
tataouiner = tourner autour du pot
royaumer = fainéanter