Aujourd’hui, je suis sortie à 13h pour aiguiser un peu mon appétit qui ne venait pas. Vite, vite, je remplis, avec lassitude, mon attestation de sortie en mentionnant l’heure, je mets mon masque, je me chausse, je m’habille, je cherche mon sac à main. Et, il est déjà 13h10 !

Et je suis déjà stressée…

Dehors, pas un bruit ! Seules, dans ce silence pesant, résonnent les cloches de la cathédrale qui sonnent déjà 13h15 ! Je presse le pas. 

Je repense alors à un passé qui me semble lointain, lorsque les terrasses ensoleillées des cafés et des restaurants étaient remplies. Je revois les serveurs affairés aller et venir, préparer et débarrasser les tables pour en préparer d’autres. Quelle animation ! Comme c’était gai ! J’entends encore les conversations animées autour des tables : les rires, les exclamations…dans une ambiance un peu euphorique !

Je revois les sourires, les visages heureux, le bonheur de se retrouver autour d’une table.

Tout cela me manque…Je mesure alors l’impact de l’ambiance dans la ville. Aujourd’hui, Rouen est une ville morte privée de ses petits commerces, de toute cette chaleur humaine qui la fait vivre et qui la rend si agréable.

Tout est figé : l’affiche de cinéma « la bonne épouse »,  » une comédie euphorisante, sortie le 11 mars » me fait sourire un peu… Les vitrines de magasins restent identiques au fil des jours. Je relis à chaque fois les mêmes affiches : « En raison des mesures gouvernementales dues à l’épidémie de coronavirus…… » 

Seule satisfaction : les arbres et arbustes semblent renaître, les feuilles sont plus vertes.

La rue devient plus propre : les poubelles publiques sont moins remplies, pas de papiers ni déchets sur les trottoirs. Les pigeons, non effrayés par le bruit des voitures, prennent leur temps pour chercher un peu de nourriture sur les pelouses et parterres de fleurs.

D’habitude, je prends le temps de flâner un peu. Cette fois, décidément non, je n’ai pas le temps, je cours à la boulangerie de la rue du Gros horloge pour y chercher un plat cuisiné, encore stressée.

Je fais la queue en respectant la distanciation 

Derrière une personne qui n’en finit pas : elle en prend pour plusieurs personnes… J’attends un peu plus (le personnel est réduit, la serveuse me sert et doit répondre au téléphone en même temps !)

Résultat : Il est déjà 13h50 quand je rentre chez moi, encore plus stressée.

Je supporte de moins en moins ce paradoxe entre le fait d’avoir du temps et d’être obligée de se presser sans arrêt pour respecter les horaires.

Catherine Lenord – 23 avril 2020