La peur est un ingrédient pratique pour qui veut gouverner son peuple sans perdre du temps à lui expliquer et à l’impliquer. La peur inhibe et rend frileux ! Le problème c’est que trop de peurs successives annihile l’impact attendu. Même plus peur….
Par Françoise Bailly
De quoi faut-il avoir peur ? Du Covid ? Non, c’est fini, on n’en parle plus. Envolé, disparu, parti voir ailleurs, le Covid.
De la guerre ? Elle est loin, largement commentée, jour après jour, depuis des studios parisiens par d’éminents spécialistes ; on peut dormir sur nos deux oreilles, c’est maitrisé.
De la sécheresse, des méga-incendies, des tornades, des inondations, bref du changement climatique ? Pas la peine. On s’en occupe, y’a un plan précis, c’est parti.
Du départ à la retraite à 64 ans ? Plus nécessaire. C’est plié. Il faut passer à autre chose : la résignation est passée par là.
De la peur du déclassement et du manque de travail pour tous ? Il va falloir faire avec les métiers de demain, être prêt au changement, adaptable et prompt à ne pas rater les opportunités, chacun les siennes. Apprends à saisir ta chance, camarade, sinon gare !
De la peur du grand remplacement, brandie à l’aide de maints exemples par des politiciens qui attendent leur heure ? De la peur du terrorisme, de la maladie, de la solitude, de la vieillesse qui nous guette tous, de la peur des pénuries ? La peur est partout. On pourrait trembler de peur. Mais à force de crier au loup, qui en a encore peur de lui ?
Comme pour effacer toutes ces peurs-là, en voici une autre : la peur de l’intelligence artificielle qui, nous annonce-t-on, va nous remplacer dans un futur proche. Elle pourrait en effet gouverner des États, créer, peindre, composer, écrire… avec plus d’efficacité que les humains, car sans état d’âme. Il ne nous resterait alors que les basses besognes du quotidien, encore, que pour cela il y aura nombre de robots. Une bonne nouvelle. Cela nous ouvrirait enfin le droit à la paresse, le droit de rire, de danser, de courir, de grimper aux arbres, de s’épouiller… Non, attention Françoise, tu vas trop loin !