L’industriel normand Auguste Badin est l’un des rares exemples de patrons humanistes. C’est ce qu’a découvert Françoise, au cours d’une conférence d’Alain Alexandre, un historien de la vallée industrielle du Cailly, en Seine Maritime.

Par Françoise S.

Auguste Badin, 1830-1917, c’est selon l’historien Alain Alexandre, un homme qui s’est fait tout seul.
Arrivé de son village de l’Orne en sabots, il commence à travailler à 12 ans comme ouvrier-rattacheur à la filature Dutuit à Barentin. Contremaitre à 15 ans, le voilà directeur à 17 ans. Inimaginable à notre époque. Ayant obtenu un prêt à 22 ans, il rachète l’usine puis il construit de nouveaux bâtiments pour filer le lin, le coton, le jute et le chanvre.
« On peut critiquer le paternalisme, mais Auguste Badin est un homme unique pour son époque qui a amélioré la vie de 2000 ouvriers » souligne l’historien. Jugez-en par vous-même.

1864 : création d’une crèche ainsi que d’une école de filles.

1872 : création de l’Orphéon, une société de musique et de chant dont la devise de Béranger de Wilhem était : « les cœurs sont près de s’entendre quand les voix ont fraternisé ».
« Auguste Badin souhaitait des ouvriers en bonne santé et heureux », précise l’historien Alain Alexandre. Dont actes.

1876 : création d’une caisse de prévoyance et d’assistance.

1892 : création d’une école maternelle et d’un hospice.

1900 : Auguste Badin emmène ses ouvriers à l’exposition universelle de Paris par deux trains spéciaux. Cette sortie inspirera une pièce de théâtre aux ouvriers qu’ils joueront eux-mêmes.

1906 : création d’un groupe scolaire mixte. « Auguste Badin voulait des ouvriers instruits pour bien lire et comprendre les consignes » explique l’historien Alain Alexandre.

Entre1881 et 1908 :  création d’un hôpital, d’un sanatorium et d’un préventorium.

Entre 1897 et 1914 : construction de la Cité Badin, soit 400 logements équipés d’un chauffage au gaz et d’un cabinet d’aisance dans le jardin.
Durant cette période, une société de gymnastique voit le jour et une piscine en plein air est édifiée. Il faut rappeler que certains ouvriers n’avaient que 12 ans.

Le 18 août 1897 : Auguste Badin célèbre le 50ème anniversaire de sa direction de l’usine. « Il organise une somptueuse fête avec le personnel :  repas gargantuesque dans la salle du Grand Cercle » ajoute l’historien Alain Alexandre.

Devenu maire de Barentin à partir de 1881 et jusqu’en 1908, Auguste Badin a financé la construction d’un hôpital, d’une nouvelle mairie et d’un nouveau groupe scolaire. Ce qui a occasionné des réjouissances avec les ouvriers et les habitants de Barentin.

Grâce à ces conditions de travail favorables et à ces améliorations des conditions de vie ouvrière, les grèves étaient rares dans les usines Badin.
« L’humanisme d’Auguste Badin lui a valu attachement et fidélité sur plusieurs générations.
Les ouvriers travaillaient pour ses usines de père en fils et de mère en fille ». Durant la première guerre mondiale, Monsieur Badin a même organisé des distributions gratuites de nourriture pour son personnel.
Reprise par son fils Georges, l’usine est devenue plus tard « établissements Badin-Sartel » avant de fermer en 2007.
Démolie à partir de 2015, il reste quelques beaux bâtiments.

La friche industrielle de 17 hectares deviendra bientôt le superbe parc paysager Badin.