Renoncer à boire de l’alcool en janvier pour vivre un « dry january (en français dans le texte : janvier sec) est une pratique qui se propage depuis une dizaine d’années et provient d’une campagne de santé publique anglaise pour lutter contre l’alcoolisme. Cette année, Martine a essayé. 

Par Martine Lelait 

Janvier se termine. Le moment de faire un petit bilan de ce Dry January ou mois sans alcool dont il me semble n’avoir jamais tant entendu parler avant cette année. L’initiative est pourtant née, il y a exactement 10 ans, au Royaume-Uni. Le concept :  ne pas boire une seule goutte d’alcool durant tout le mois de janvier.

Il s’agit là non pas d’un diktat mais d’une proposition, sans contrainte ni punition si on ne s’y tient pas ; c’est un défi qu’on se donne à soi-même, un choix strictement personnel, de s’accorder un moment privilégié dans l’année pour faire le point sur sa consommation d’alcool, qu’elle soit problématique ou non. 

Selon des chercheurs britanniques, les conséquences d’une abstinence seraient globalement positives : meilleur sommeil, meilleure forme, vie sexuelle plus satisfaisante, perte de poids, économie d’argent, sentiment de victoire lorsqu’on a tenu tout le mois 

(Source : le site officiel du Dry January, #LeDéfiDeJanvier). 

Si le concept est archi-simple à comprendre, il est peut-être moins facile à mettre en œuvre et il est surtout source de nombreuses discussions, voire de critiques depuis son importation en France.

Par exemple, le philosophe Guillaume von der Weid, chroniqueur au mensuel Santé Mentale, regrette que cette campagne n’arrive pas au bon moment dans l’année. Le fait que ce soit le mois de janvier qui ait été choisi pourrait laisser entendre que seuls les excès liés aux fêtes de Noël et du Nouvel An seraient néfastes pour la santé et qu’un « petit coup de Dry January » remettrait les pendules à l’heure et autoriserait à reprendre une consommation régulière, voire abusive, les autres 11 mois de l’année ; autrement dit, que cette initiative limitée dans le temps ressemblerait à un coup d’épée dans l’eau, sinon dans l’alcool.  

Pour d’autres au contraire, le mois de janvier est très symbolique : il marque le commencement d’une nouvelle année et constitue le bon moment pour prendre de bonnes résolutions qui pourront peut-être durer au-delà des seuls 31 premiers jours de l’année.

Autre critique : la durée de l’abstinence. Un mois sans alcool serait jugé trop court pour que les effets s’en fassent réellement sentir. Et trop longs pour ceux qui ont du mal à s’en passer.  Claude Rambaud, première vice-présidente de France Assos Santé, qui promeut le Dry January, reconnaît en effet que cette campagne ne s’adresse pas aux personnes qui rencontrent de lourdes addictions. Elle vise le commun des mortels qui estime que l’alcool ne représente pas un problème. Ce sont les petites habitudes au quotidien d’un verre par-ci ou par-là, sur lesquelles ce Dry January permet de s’interroger.

Et moi dans tout ça, me direz-vous ? Eh bien, je ne suis pas allée jusqu’à l’abstinence complète mais au lieu de lever le coude, j’ai très sérieusement levé le pied. Cela s’est avéré par moments une gageure surtout lorsque je me suis retrouvée invitée. Mais finalement, cela s’est passé sans difficulté majeure. A l’évidence, il est plus facile de refuser un apéritif quand on est plusieurs autour de la table à faire de même. C’est là où le Dry January est facilitant, car il permet de n’être pas seul dans la démarche. Je terminerai en déplorant le manque d’accompagnement du Ministère de la Santé, des pouvoirs publics en général (sauf dans certaines villes comme Grenoble ou Paris en 2022) qui ne donne pas à cette campagne l’ampleur qu’elle pourrait avoir si elle était relayée par des spots télévisés, par de l’affichage dans les lieux publics. Sans doute les lobbys de pinardiers et les enjeux économiques sont-ils suffisamment importants pour qu’on ne touche pas à cette sacro-sainte habitude française.