La polémique autour du principe éducatif « time out », une punition de mise à l’écart ramène Marie à son enfance. A-t-elle profité de ses mises au coin ? En tout cas, elle s’en souvient. Et c’est déjà bien. 

Par Marie H.

Autrefois, les enfants punis allaient « au coin », le visage tourné vers le mur. Ils y demeuraient un temps plus ou moins long, selon le bon vouloir du prescripteur. Autre temps, autres mœurs, on parle maintenant de « time out ». Cet anglicisme désigne l’envoi de l’enfant puni dans sa chambre, une mise à l’écart censée lui permettre de réfléchir à sa faute et l’aider à s’en repentir. 

Enfant, lors de mes conversations muettes avec un mur, je comptais mentalement les minutes et attendais que cela passe. Sans doute, existait-il de meilleure nature, qui se promettait de ne pas recommencer. Je ne me souviens pas avoir éprouvé de semblables bons sentiments.

C’est un aveu que je n’ai pas fait à ma petite-nièce âgée de dix ans, à qui je révélais ce genre de punition. Avec une certaine commisération, elle a éclaté de rire et déclaré :

– Aller au coin ? Quelle drôle d’idée ! Ce n’est pas une vraie punition. Pour me punir, mon père a confisqué mon smartphone qu’il a gardé une semaine enfermée dans un tiroir de son bureau. 
J’ai remballé ma punition « à deux balles » et j’ai compati, sans oser demander ce qui avait valu à Sophie une si féroce punition ! Et non sans me dire in petto que personne n’aurait pu, il y a soixante-dix ans, me confisquer quelque objet auquel je tenais, je n’en possédais pas, et évidemment pas un smartphone qui relevait d’une lointaine science-fiction. 

J’ai laissé la conclusion à Sophie, qui m’a confié :

– Mon père est sévère mais juste.

Avant d’ajouter :

-Toi, tu n’es pas trop vieille puisque tu te souviens d’avoir été une enfant qui faisait des bêtises.

Une assertion que j’ai prise comme un compliment et qui m’a remplie d’une joie iconoclaste.

Oui, Sophie, les meilleurs adultes ont grandi avec leur enfance et savent s’en souvenir.