Dès la mise en place du confinement, très obéissante, je me suis conformée aux directives de rester chez moi et de limiter les sorties au strict indispensable, consentant par là-même à la restriction de ma propre liberté d’aller et venir, liberté que j’estimais jusqu’alors, sinon la chose la plus précieuse au monde, en tout cas, une prérogative incommensurable.

Cette intériorisation de la consigne, cette soumission à l’autorité, ce consentement inédit à mon propre enfermement m’a en même temps très étonnée et amenée à m’interroger. Moi qui me croyais plutôt rebelle, libre dans mes pensées, mes faits et gestes, dans mes amours, mes déplacements, ne serais-je qu’un petit mouton bien obéissant ayant accepté en conscience d’aliéner toute son autonomie ? 

Pour essayer d’y voir clair entre ces deux pôles, rebelle ou soumise, j’ai repensé à nombre d’épisodes de ma vie, proches ou très lointains, à de grandes et petites choses de la vie courante, pour déterminer à chaque fois si c’était plutôt signe de rébellion ou au contraire signe de conformisme, d’obéissance à une norme.

Je ne livrerai pas ici toutes les choses que j’ai mises dans la balance, c’est bien trop intime mais je peux dire qu’après cette opération, je n’ai pas le sentiment que la balance penche plus d’un côté que de l’autre. Bref, je ne sais toujours pas… Sans doute suis-je faite de forces et de faiblesses imbriquées, de blanc et de noir tout aussi mélangés, bref de toute une gamme de gris… qui au demeurant va assez bien avec mes cheveux !

A ce jour, je ne sais pas non plus si je vais accepter d’être encore plus « tracée » qu’aujourd’hui avec mon téléphone portable avec la fameuse application Stop Covid. Toutes mes tripes me crient que non assurément pas question quand ma tête et ma trouille de la maladie me disent que pourquoi pas… Il me semble avoir vu que certains appellent cette application « Robert » pour franciser un acronyme anglais, mais pour l’instant, je n’ai pas envie de faire ami-ami avec ce Robert-là.

Martine Lelait 27 avril 2020