C’est un soir de printemps. Elle a pris une attitude décontractée. La fenêtre ouverte au-dessus de l’évier lui apporte le souffle parfumé du muguet. Ce muguet offert il y a des années, repiqué, et qui avait pris ses aises dans le jardin. 

Sur les étagères de son atelier, sont rangés son plumier, ses pinces, ses carnets de dessin, ses pinceaux et autre matériel dont elle se sert à l’occasion. Elle avait pris des cours de dessin il y a un certain temps. Après avoir représenté des oiseaux, des paysages enneigés, des silhouettes de promeneurs sur une plage, ils étaient passés au portrait. Travail vraiment difficile qu’elle avait interrompu, pensant le terminer chez elle en prenant tout son temps.

« C’est peut-être le temps de m’y remettre » songe-t-elle en s’étirant. Alors elle se lève doucement, change de pièce, installe une planche sur ses tréteaux et attache avec des pinces ce fameux portrait qui lui donne tant de mal. Elle prend une glace puisque c’est un autoportrait. « Mon Dieu, que de rides » ! Est-il vraiment utile de consigner sur le papier un tel visage ?

Alors plutôt que d’aller chercher une corde pour se pendre, elle déchire violemment ce dernier dessin et le jette rageusement à la poubelle.

« Maintenant qu’on commence à être dé-confiné, je vais aller prendre un bon bol d’air, me promener sur les quais verdoyants et rencontrer des personnes qui… se cachent le visage. Mais quelle bonne idée, on voit moins les rides » !

Marie-Claude 11 mai 2020