L’âge de départ à la retraite est un marronnier de l’actualité. Mais c’est la question de l’égalité entre les sexes qui a retenu l’attention des six femmes présentes à notre revue de presse. Les femmes sont-elles les égales des hommes quand il s’agit d’achever son parcours professionnel ?

Revue de presse à la Maison des Aînés de Rouen. 
Étaient présents :  Anne, Eliane, Mireille, Odile, Patricia, Paulette.

Patricia : Au moment de prendre sa retraite, avoir suivi un parcours professionnel complet est un avantage indéniable. Tout le monde ne peut pas y prétendre et les femmes encore moins que les hommes. Le travail des femmes est moins bien rémunéré et parfois, il n’est pas reconnu du tout. J’ai longtemps travaillé dans le milieu paramédical et j’ai rencontré beaucoup de femmes qui aidaient leur mari sans être toujours déclarées. 

Mireille : Cela fait des siècles que les femmes travaillent deux fois plus que les hommes, sans pouvoir le faire valoir. Ma famille faisait de l’élevage, le travail de ma mère n’a jamais été reconnu.

Eliane : Tant que les femmes passeront après les hommes, le problème d’avoir une carrière pleine pour elles se posera. Personnellement, j’ai travaillé jusqu’à ce que nous nous installions dans un village à l’écart de tout. Nous avions deux enfants dont il fallait s’occuper et une seule voiture pour nous déplacer ; l’un de nous était obligé de rester à la maison. A l’époque, c’était toujours la femme qui devait assumer ce genre de situation. Dans notre cas, c’était un choix commun mais j’en subis les conséquences à présent. Je touche une petite retraite. J’aurais bien du mal à vivre si je ne devais compter que sur elle.

Anne : Énormément de femmes subissent ce genre de problèmes : carrières incomplètes, travail au noir, choix familiaux, éducation des enfants. Les femmes sont supposées accompagner la carrière de leur mari. On peut voir un documentaire sur Arte intitulé « les femmes riches ne courent pas les rues » qui montre que les femmes ne gagnent pas autant que les hommes, qu’elles s’appauvrissent en cas de divorce et au moment de la retraite. 
C’est un cercle vicieux. Les hommes travaillant davantage, ils accèdent plus facilement aux postes à responsabilité qui sont aussi les mieux rémunérés. Au contraire, les femmes acceptent souvent des postes moins valorisés. On ne peut pas le leur reprocher, c’est celui qui embauche qui est responsable. J’avais un ami patron qui considérait normal de moins bien payer les femmes au prétexte qu’elles sont plus souvent absentes et sont moins efficaces au travail. C’est faux et insupportable.

Patricia : A partir de 2026, les entreprises devront afficher une fourchette de salaire sur leurs offres d’emploi afin de réduire les inégalités salariales. J’espère que cela se fera vraiment. Cela devrait aider les femmes à prendre conscience de leurs droits et de leur valeur mais oseront-elles faire les démarches après ? C’est une question importante, la différence de salaire a des conséquences au moment de calculer sa retraite. 

Eliane : J’ai des doutes sur l’efficacité de l’affichage des salaires, cela mettrait en avant de telles différences de rémunérations que cela risque de créer des conflits internes.

Odile : Est-ce que cela ne va pas générer des jalousies ?

Patricia : Cela fait partie des progrès qui peuvent faire évoluer la situation. Il y a quelques années, le statut de « conjoint collaborateur » a été créé ; il a permis aux femmes qui travaillaient dans un cadre familial d’obtenir une reconnaissance sociale et de bénéficier de carrières complètes au moment de faire valoir leurs années de travail. Avant, on considérait normal que la femme soit considérée comme aidante sans avoir aucun droit.

Eliane : Je pense que les jeunes femmes se positionnent mieux par rapport à tous ces problèmes ; on en parle beaucoup, il y a une prise de conscience.

Patricia : Aujourd’hui, beaucoup de femmes s’engagent dans des études plus longues, commencent à travailler plus tard, et envisagent d’avoir des enfants à un âge plus avancé. D’une certaine manière les femmes deviennent carriéristes.

Odile : Je crois aussi que la manière d’appréhender sa carrière a évolué ; les jeunes doivent tout de suite penser à leur retraite. Ils investissent dès 25 ans dans des complémentaires parce qu’ils ne sont pas sûrs de l’avenir. 
Quand je regarde en arrière, je m’aperçois que cette question ne m’a pas toujours préoccupée. Pourtant j’ai été malade pendant 10 ans mais j’étais toute jeune et j’ai pu racheter les points.

Patricia : Pendant longtemps, on construisait sa vie sans se poser toutes les questions que l’on se pose aujourd’hui. On n’anticipait pas autant. 

Anne : On voit en effet que les jeunes femmes s’aguerrissent sur le plan professionnel mais elles sont encore prédestinées à exercer certains métiers, souvent dans le domaine social. La pression sociale et familiale reste un frein puissant. 

Paulette : Je dois avouer que je suis un peu décalée. J’avais envie de devenir dentiste et je suis devenue dentiste. J’avais assez de moyens pour ouvrir mon cabinet et j’ai toujours pu exercer mon métier de manière indépendante sans jamais dépendre d’un homme. Enfin, concernant la retraite, j’ai cessé d’exercer au moment qui me convenait. Les problèmes que j’ai rencontrés concernait la santé de mes patients mais pas ma position de femme. J’ai été extrêmement privilégiée et j’en ai tout à fait conscience.